25.11.11

LE CINÉMA AMÉRICAIN EST-IL LE PIRE DU MONDE ?

J'aime bien des phrases comme celle-là. Les Etats-Unis sont devenus tellement sacrés que ça m'amuse. La réponse à la question, je ne l'ai pas vraiment. J'aime mieux la poser qu'y répondre. Je ne discuterai pas sérieusement du film de Scorsese, Hugo, alias Hugo Cabret en VF. C'est un mauvais débat que de se lancer là-dedans. A la limite, je ne suis pas compétent. Ce cinéma ne me concerne pas. On peut certes dire qu'il a le mérite de rappeler la place de Georges Méliès dans le cinéma, ce que ne font pas beaucoup les Français – à part l'infatigable Serge Bromberg, naturellement, dont le documentaire et la restauration du Voyage dans la lune sortent la même semaine. A priori je vous enjoins à aller voir plutôt ça que le Scorsese, qui m'a soit dit en passant rappelé le meilleur film de Chahine, Gare centrale. C'est ça que Scorsese aurait dû faire : un remake de Gare centrale. Ce que je remarque surtout c'est que Scorsese récrit l'histoire. Il l'américanise. Il rappelle que Méliès a existé, mais lorsque l'automate signe le nom du cinéaste, il oublie un accent et écrit "Mélies". C'est un détail, mais il montre à quel point les anglo-saxons ne s'intéressent jamais vraiment au reste du monde. J'ai été particulièrement frappé par le fait que quand Scorsese montre un résumé accéléré du cinéma muet dans le film, il le consacre à 98% aux films de son pays. Du cinéma européen, il ne me semble avoir vu qu'un plan du Cabinet du Docteur Caligari. Dans ce digest, il insiste surtout sur l'image d'Harold Lloyd suspendu à une horloge (idée dupliquée dans le film lui-même). Evidemment, il parle de Méliès, puisque c'est le sujet. Mais ce n'est pas le premier Américain à s'y être intéressé sérieusement comme on le voit dans le docu de Bromberg. Par ailleurs les références littéraires sont également anglaises. On parle de Dickens (certes on mentionne en passant Jules Verne, un des inspirateurs de Méliès), et l'un des personnages cite même du Coleridge, poète anglais très peu connu des Français. Quant à la description des autochtones, elle est toujours aussi factice. On remarque tout de même que Christopher Lee est revenu à la case départ : il joue à nouveau les utilités dans un film rétro hollywoodien situé à Paris. Dans Moulin Rouge (celui de Huston, 1952) il incarnait Georges Seurat. Ici, un libraire style Père Noël. Scorsese s'explique ainsi du casting : “J'ai choisi des acteurs anglais pour la plupart des rôles, et j'utilise l'accent britannique comme s'il faisait partie de l'univers des personnages. Même si le cadre de l'histoire est le Paris de 1931, il s'agit d'un monde rêvé, d'une réalité sublimée, et jouer sur l'accent contribue au décalage.” Autrement dit, quand un Américain rêve de la France, il rêve qu'elle est peuplée d'Anglais. Etrange, car Spielberg a procédé de même pour son Tintin, où ce sont des Anglais qui incarnent les héros. Autrement dit, ce que les Américains ont imaginé de plus exotique pour représenter l'Europe (la France ou la France/Belgique) ce sont des gens parlant la même langue qu'eux avec un accent archaïque. Je tire sans doute des conclusions hâtives, mais dans cent ou deux cents ans, la France sera peut-être économiquement morte et transformée en vaste Disneyland à l'usage de la planète entière.

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