30.9.11

FRENCHICHI

Je ris presque (intérieurement) d'avoir vu un film tel que L'art d'aimer d'Emmanuel Mouret, qui concentre la part la plus dérisoire et anodine de l'esprit français (chichiteux). Quand je vois ça, je n'ai aucun complexe d'être moi aussi, à ma manière, dérisoire et anodin (évidemment ma manière est très différente). A propos d'esprit français, ma liste provisoire des dix meilleurs films de l'année ne comporte (pour l'instant) que deux films de notre verte et riante contrée : Dharma guns et Hors Satan. Cela reste en suspens. Je pourrais y inclure Lourdes, qui n'est pas complètement français. Il y a des choses que j'adore et d'autres que je déteste dans Dharma guns, donc il a des chances d'y être toujours à l'arrivée. Idem pour Hors Satan. Dans le fond, Dumont voudrait être un continuateur de Bresson et y arrive presque. Quant à Lourdes, c'est moins sûr (ça ronronne un peu). Le reste ? Peut-être The artist où, à force de parodie millimétrée et de singerie rétro, le cinéaste trouve quelques idées sublimes (c'est déjà beaucoup mieux que ses potaches OSS 117). Après ? Rien, morne plaine, que des immondices parisianistes (l'un des plus beaux étant Pater, sur lequel je me suis déjà légèrement étendu), des téléfilms sociohumanitaires, ou des brûlots romantocs de chez toc (Honoré qui n'est pas Balzac).

28.9.11

HUMANITÉ

Voilà le SMS que je me suis envoyé hier pendant une projo (je n'avais pas de crayon) : "Ce n'est pas l'humanité qui ne va pas mais le fait qu'il y ait une humanité". Je sais que c'est simple et naïf, hélas c'est pourtant vrai. Je me disais qu'il ne pouvait pas y avoir d'utopie, car personne n'est capable de penser l'utopie. On n'est capable de penser que le malheur et l'accident, et comment y remédier. L'homme est une fourmi pas un roseau pensant. Franchement je ne vois pas concrètement à quoi pourrait ressembler une utopie ou un idéal, parce que d'une certaine manière nous vivons dans le meilleur des mondes possibles. Si l'on dit qu'une utopie serait de supprimer sang, crime, violence, guerre, pauvreté, injustice, cela signifie qu'il faudrait aussi supprimer toute l'histoire, tout le cinéma, toute la littérature, et même une partie de la peinture, qui en sont pleins. Ce sont donc des exemples pernicieux. S'il n'y avait pas d'humanité, le monde ne serait pas parfait, mais il serait bien plus harmonieux et fonctionnel. La seule raison d'être de l'homme est de générer du désordre. Je n'en vois pas d'autre. Après, le désordre est peut-être une notion intéressante, dynamique, mais cela reste assez vain et/ou gratuit. Prenons un exemple : pour certains l'avenir du genre humain, c'est le métissage. Tout le monde sera mélangé, légèrement bronzé, et le racisme aura disparu. Je crois qu'ainsi on ne fait que déplacer le problème. Car on créera alors d'autres discriminations. De plus, malgré le racisme, je ne préconise pas le métissage, car on perdrait une partie de la variété qui fait l'intérêt de la vie. C'est mon côté anti-mondialisation. Evidemment je garde une certaine tendresse coupable pour cette humanité (je ne me vois pas vivre avec des otaries ou des scolopendres). C'est ma famille, je n'en ai pas d'autre. Mais elle est excessivement turbulente et elle a surtout tendance à ne pas réfléchir avant d'agir, donc à commettre toujours les mêmes erreurs, à faire des choses qu'elle est obligée de défaire l'instant d'après. On devrait vivre au ralenti et tout irait mieux. Il y a des choses que je trouve ridicules, voire puériles, mais dont personne ne semble se rendre compte. Exemple : le sempiternel feuilleton Israël/Palestine. C'est pitoyable. Depuis au moins 40 ans ces gens font toujours semblant d'aller vers un accord, et puis aboutissent systématiquement à un échec. Pourtant tous les politiques, tous les médias jouent (à) leur jeu, font semblant de croire à leur sincérité, au lieu de leur dire : "Vous vous foutez du monde !". Bon, je ferme le robinet de mes élucubrations. A suivre

B.D.

Bruno Dumont remonte dans mon estime avec Hors Satan, même si je n'ai vu que peu de ses films et si, d'une certaine manière, je me fous un peu du scénario. C'est autre chose qui me plaît dans ce film. La marche, le laconisme, la végétation, les dialogues raréfiés, les plans larges. En gros, le côté Du soleil pour les gueux (Guiraudie). Franchement, j'aime énormément de choses, y compris les deux comédiens principaux. Après il y a le côté bondieuserie, les plans chromo. Je ne sais pas s'il a copié délibérément L'Angélus de Millet, mais c'est troublant.

21.9.11

CUILLER DE MIEL

C'est sûr, le cinéma français est toujours aussi mauvais. C'est sûr, il fait toujours illusion par sa force à traduire de manière assez précise la banalité et la futilité de sa bourgeoisie. C'est avant tout un cinéma de qualité (c'est sûr, je généralise). Cette qualité n'est pas due aux réalisateurs eux-mêmes, enfin pas seulement, mais à tout un corps de métier accroché à ses prérogatives et ses traditions comme l'était jadis la noblesse française. Chaque professionnel de la profession, cossu et bien nourri, entend montrer son savoir faire avec une fierté d'artisan. C'est bien là le problème. Personne n'accepte jamais de lâcher du lest. Ce qui nous donne des films pleins comme des œufs, moulés à la louche et ventripotents. Le style Louis-Philippe. A part ça, ce sont des baudruches, des borborygmes. Tiens, la meilleure métaphore de ce monde c'est Skylab, la comédie de Juliette Delpy, qui décrit avec une sorte de plaisir gourmand et rigolard la vulgarité à tous les étages d'une famille franchouillarde réunie pour une partie de campagne dans les années 1970. Mais ce qui m'a fait tilter ce n'est pas ça. C'est la petite cuiller de miel (de châtaigne) dans le café du chef de cabinet (Michel Blanc) du ministre des Transports, dans L'exercice de l'Etat de Pierre Schœller. Je concède au réalisateur une magistrale scène d'accident, remarquablement gérée et montée. Là je m'incline. Le reste c'est de la qualité au kilomètre avec des petites cuillers de miel dans tous les coins. C'est à dire des petits détails qui font vrai. Ce sont précisément ces petits détails qui font vrai qui foutent tout en l'air, car ils révèlent une incroyable petitesse d'esprit. Ces petits détails qui font vrai ne font pas vrai, ils font laborieux, gagne-petit, artisan, menuise-menuise. Dans le fond, je ne suis pas contre le cinéma d'artisan, quand c'est l'œuvre d'un seul artisan. Mais quand c'est toute une armée de corps de métier qui vient ajouter ses touches soignées à une pièce montée, c'est l'esprit Versailles : morgue m'as-tu-vu et haine pour le réel. L'esprit étriqué et mesquin du jardin à la française. Schœller a justement réalisé un film intitulé Versailles — que je n'ai pas vu en entier, car cette vision tellement fabriquée de la zone (les SDF) dans les bois m'insupportait au plus haut point. Réalisme poétique etc. Avec L'exercice de l'Etat ce n'est pas le même problème, mais ça ne change rien. La presse va s'extasier, parler de fable grandiose et cinglante sur le monde politique, de "comédie du pouvoir" et que sais-je encore. Olivier Gourmet (acteur principal) va prendre son César en faisant des génuflexions devant Antoine Déconne. Pour moi, c'est précisément le genre de films qui font que l'autosatisfaction à la française se perpétue à l'infini, tant par ce qu'on décrit qu'à cause de la manière dont on le décrit. Honnêtement, même les très mauvais Anglais font mieux. Après c'est sûr que la France est un pays confortable. Le plus confortable peut-être, avec l'Italie (qui a certes beaucoup baissé). Mais jusqu'à quand ?
P.S. Tout est relatif. Je viens de voir Les marches du pouvoir, vision lyophilisée des coulisses d'une campagne électorale américaine selon George Clooney, piètre cinéaste. C'est bien pire dans le registre politique que le Schœller (quoi qu'il y ait des similitudes). Mais ce n'est pas une raison…

18.9.11

BOUM †

Il y a des épisodes de l'histoire qui me font douter de tout. Par exemple, ces histoires de terroristes d'extrême-gauche dans les années 1970, RAF en Allemagne, BR en Italie, sans parler des Tupamaros en Uruguay (dont un ancien membre est l'actuel président de ce pays), ni de la JRA au Japon et de la SLA aux Etats Unis. Tous ces gens là se rêvaient en Mao, Lénine, Castro, et surtout Guevara. Mais ils n'avaient en général qu'une formation politique sommaire, aucun soutien sérieux (sauf la JRA qui émargeait au FPLP palestinien), aucun plan, aucune stratégie à long terme. Juste envie de foutre un peu le souk. Certains étaient d'ailleurs plus proches du gangstérisme que de la politique. Aujourd'hui on ne peut plus voir en eux que des alliés objectifs ou involontaires du capitalisme, qui ont empêché indirectement tous les mouvements d'extrême-gauche officiels de dépasser une audience minime. Non pas que je sois en faveur de l'extrême-gauche puisqu'elle sert des idées marxistes, qui ne sont fondées que sur une conception industrielle et productiviste de la société. Mais disons qu'entre deux maux on devrait toujours avoir le choix. Ce qui est loin d'être le cas. Tout ça pour dire que ces soi-disant justiciers sociaux, ces terroristes occidentaux (et autres d'ailleurs) censés secouer le cocotier de la civilisation et la faire trembler sur ses fondements n'ont été que des fantoches romantiques ayant justifié nombre de serrages de vis et la régression de la société droitière. Le fond du fond c'est que notre monde est totalement anarchique, livré aux délires du productivisme irraisonné, qui se fait fort quand il veut où il veut d'asservir encore plus puissamment les individus à coups d'objets inhumains, inutiles et destructeurs (à petit feu). Une chose est sûre et certaine c'est que la liberté ne sera jamais un produit Apple (comme celui sur lequel j'écris ces radotages).
P.S. J'ajoute un exemple symptomatique de cet asservissement, un détail absolument machiavélique, qui s'appelle les "mises à jour" de logiciel, qui vous sont proposées régulièrement sur votre ordinateur. C'est quasiment un moyen de flicage. Grâce à cela on s'assure que vous êtes toujours accro, que vous utilisez toujours votre ordinateur, et éventuellement que vous allez en acquérir un nouveau. Ce que je dis n'est pas très précis, mais c'est évidemment ça. Toutes ces myriades "d'applis" et autres visent à perpétuer la dépendance à toutes ces machines virtuelles dont vous ne questionnez plus la nécessité. Aujourd'hui, les gens n'utilisent plus les cartes routières : ils attendent que leur GPS leur mâche le boulot. On ne se sert plus de la technique, on est asservi par la technique.

15.9.11

MUSIQUE

Eh oui, désolé, je reviens à la musique. Difficile de résister. Je ne sais pas si les musiciens sont des auteurs (LOL), mais je m'en sur-contrefous. Je me demande quand je verrai des films qui me feront autant d'effet que la musique (Andrey Rublov perhaps ?). C'est sans doute une des raisons pour lesquelles Attenberg m'a autant séduit : l'omniprésence de Suicide, "groupe" d'Alan Vega dans la bande son et même dans les dialogues puisque les personnages en parlent. Il faut aller jusqu'en Grèce pour entendre Alan Vega dans une BO !
Par ailleurs un clip moyen d'un groupe que je ne connaissais pas, Twin sisters, dont j'apprécie surtout ce morceau All around and away we go, avec une intro qui semble plagiée sur Cargo de nuit d'Axel Bauer : CLIC. Certains classent ça dans le genre chillwave, dont j'ai déjà fourni un exemple il y a quelque temps avec Ariel Pink. Pop dissonnante comme j'aime.
Autre type de musique acidulée qui décape en profondeur car elle est bien plus pernicieuse que ses sonorités doucereuses de rock néo-sixties ne le laissent paraître : The Raveonettes, le plus grand groupe danois de tous les temps, qui est par ailleurs un duo (comme Suicide, qui est d'ailleurs le titre d'un de leurs morceaux). Il s'apparente de très près, non seulement à la pop 60's, style Shadows ou Shangrilas, mais surtout au Jesus & Mary Chain des années 1990, dont il s'inspire énormément. Un exemple avec une session filmée des Raveonettes dans un studio de radio de Los Angeles : CLIC

14.9.11

COMMENTAIRES (2)

J'accepte les commentaires à condition qu'ils ne soient pas stériles ni agressifs. Si je ne les trouve ni intéressants ni constructifs et/ou trop insultants, je ne les publierai pas. Si les commentaires de ce type se multiplient je supprimerai l'option. Idem si un commentateur m'inonde de messages interminables et m'intime d'y répondre et de les publier. Dans mon précédent blog je refusais les commentaires car je craignais ce type de dérive. Ceux qui ont besoin de s'exprimer in extenso ou de polémiquer à tout va, peuvent soit créer leur propre blog, soit participer aux myriades de forums accessibles sur le net. C'était mon dernier avertissement.

12.9.11

ATTENBERG !

On notera dans le commentaire ci-dessous que "film d'auteur" est désormais une insulte. Comme dans "Va donc, eh film d'auteur !"

8.9.11

HORRORS

The Horrors existent depuis six ans, mais je viens seulement de m'apercevoir de leur existence au moment où sort leur troisième album, Skying, qu'a priori je trouve plus lisse que le précédent, Primary Colours. Un groupe vaguement gothique catalogué "punk/garage" d'après ce que j'ai lu, mais dont les influences sont multiples, allant de Joy Division à Echo and the Bunnymen. Quoique j'aie l'impression que le chanteur a un peu la voix de Nico dans le clip puissant de Who can say (CLIC) tiré de Primary Colours. On n'en finira pas avec les références en disant que leur premier single, Sheena is a parasite — voir le clip marquant, réalisé par Chris Cunningham (CLIC) où figure l'actrice Samanta Morton en pantin horrifique (justement) —, se réfère au Sheena is a punk rocker des Ramones, dont le chanteur Faris rappelle l'échalas Joey Ramone. Dans un même ordre d'idée il est dit qu'ils sont (ou étaient) fans des Cramps, ce qui s'entend moins.

7.9.11

SUPERHEBDO

Voici le journal que je lisais religieusement chaque semaine lorsque j'étais lycéen. C'était un hebdo consacré au rock, imprimé sur papier journal, format tabloïd. J'adorais son odeur. Des siècles après j'écris sur le cinéma dans un hebdo de rock (ou disons à connotation rock), que j'achèterais sans doute si j'étais ado aujourd'hui. Etrange continuité.

6.9.11

PRÉSIDENT

Je ne m'inquiète pas tellement pour les élections françaises, qui ne devraient pas connaître de coup de théâtre majeur (entre Pinocchio et Oui-Oui, mon cœur balance), mais plutôt pour celles des Etats-Unis (novembre 2012), où je vois mal comment Barack Obama pourrait être reconduit. Certes, on a fait ouf quand il a gagné, on était soulagé d'être débarrassé du "moron" Bush, mais Obama a suscité des espoirs qu'il n'a comblés dans aucun domaine. C'est sans doute trop tôt pour conclure, mais c'est quelqu'un qui me semble trop neutre, voire effacé, qui n'a pas su manœuvrer, entre ses ennemis républicains et l'intelligentsia économique qui le musèle. Un homme de gauche dans un costume de droite, qui n'a jamais osé en faire craquer les coutures. Attendons nous à un retour de bâton de ce côté là du monde. Le pire c'est que l'histoire a désormais prouvé que la droite (en général) et ses options libérales étaient catastrophiques à long terme.

5.9.11

CLOCK ???

Plusieurs personnes s'extasient sur The clock, film de found footage de Christian Marclay projeté au Centre Pompidou ce week-end. Pourquoi cela fait-il événement ? Parce que le film dure 24 h et qu'il est fondé sur la présence à l'écran de cadrans de montres, d'horloges, et de pendules dans les extraits choisis. Ces cadrans étant synchrones avec la période de la diffusion, on n'a pas besoin de regarder sa montre pendant le film. J'en ai vu un bout sur internet. Honnêtement, à part le gimmick précité, cela ne me semble pas extraordinaire. Pendant ce temps, Matthias Müller et Christoph Girardet présentaient leur dernier court-métrage expérimental, Meteor, au festival de Venise. Ce qu'il font, eux, dans le domaine du found footage est totalement génial (je pèse mes mots), mais ils sont éclipsés par des malins comme Christian Marclay qui ne leur arrive pas à la cheville. Bref, il faut faire gros et grand pour faire parler de soi et obtenir des subventions.

3.9.11

W

Vraiment pas mal du tout, a priori : Lucky McKee, le réalisateur du très spécial May, dont on a loupé les deux films suivants, The Woods et Red (inédits), revient avec un truc assez incroyable intitulé The Woman. La bande annonce est particulièrement impressionnante, mais j'ai la flemme de la copier. L'histoire d'une famille américaine ordinaire, dont le père découvre une femme sauvage dans une forêt, la capture et l'enferme dans sa cave en espérant la civiliser. Très bon sujet, qui semble traité comme May, avec un tout petit zeste d'humour, grâce auquel cela grince encore plus. J'espère que ça sortira en France…
P.S. pour les amateurs, on me signale qu'il passe à l"Etrange Festival à Paris, au Forum des images. En fait aujourd'hui même :

Dimanche 4 septembre à 21H30 (Salle 100)

P.S. : un lecteur fidèle, Guillaume, m'affirme que le film est nul. J'ai copié ci-dessous son commentaire, en enlevant le lien pour le télécharger. Je suis contre le téléchargement, pas pour une raison morale, ni légale, mais parce que je n'aime pas regarder les longs métrages sur un petit écran – même si je le fais souvent par obligation. Guillaume me casse un peu la baraque, mais a sans doute raison. Je verrai le film s'il sort. Ce n'est pas urgent. Pour une fois que je crois que je vais aimer un film de genre, j'ai l'impression que c'est encore raté.

2.9.11

COMMENTAIRES

Je suis à deux doigts de supprimer l'option commentaire de ce blog qui a priori n'est pas un forum.

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excellentisssime blog photo (d'Emilie Lamy)